
La promesse du Citizen Development est séduisante : permettre aux métiers de créer eux-mêmes des applications simples, en réponse rapide à leurs besoins, sans mobiliser toute la DSI.
Dans cet article, nous allons surtout parler de Citizen Development avec Microsoft Power Platform, car c’est aujourd’hui la plateforme la plus répandue dans les entreprises déjà ancrées dans l’écosystème Microsoft.
Le Citizen Development, c’est l’idée que des collaborateurs non développeurs créent eux-mêmes des applications pour répondre à leurs besoins métiers.
Ce n’est pas nouveau. Dans les années 90, beaucoup d’entreprises utilisaient Access pour monter leurs propres bases de données. Puis Excel et ses macros VBA sont devenus l’outil privilégié pour automatiser des calculs, gérer des processus ou construire des reportings.
Ces solutions locales avaient deux avantages : une réponse rapide aux besoins, et une certaine autonomie par rapport à la DSI. Mais elles présentaient aussi des limites : fichiers critiques mais non sécurisés, dépendance à une seule personne “qui sait”, difficulté à maintenir sur le long terme.
Aujourd’hui, les plateformes low code comme la Microsoft Power Platform (Power Apps, Power Automate, Power BI, Power Virtual Agents) reprennent le flambeau. Elles permettent aux métiers de créer des applications plus robustes, intégrées au SI, et plus faciles à maintenir qu’un fichier Excel isolé.
D’ailleurs, beaucoup de nos clients arrivent avec la même demande : “ Nous avons des fichiers Excel devenus critiques, utilisés par toute l’équipe. Nous voulons une vraie application, car nous avons atteint les limites. ”
Mais une constante demeure : sans gouvernance claire, le citizen development finit par recréer les mêmes travers qu’hier.
Toutes les applications ne se prêtent pas au citizen dev. La première étape d’une démarche sérieuse consiste à définir des critères clairs. Voici quelques exemples, à adapter selon le contexte de l’entreprise.
1. Complexité fonctionnelle
✔️ Bon candidat : suivi d’un stock interne, gestion de demandes RH, automatisation de validations simples.
❌ Mauvais candidat : processus critique, multi-acteurs, avec de nombreux workflows et une forte intégration SI.
2. Public cible
✔️ Interne : Power Apps est parfait pour des collaborateurs déjà dans l’écosystème Microsoft.
❌ Externe : si l’application doit être utilisée par des clients ou partenaires, il vaut mieux envisager d’autres solutions plus adaptées.
3. Expérience utilisateur attendue
✔️ Usage interne où l’UX peut rester basique.
❌ Cas où l’expérience utilisateur est critique. (Clin d’œil : notre UX designeuse n’aime pas du tout Power Platform pour cette raison.)
4. Nombre d’utilisateurs
✔️ Quelques dizaines ou centaines d’utilisateurs internes.
❌ Plusieurs milliers d’utilisateurs aux besoins variés : on entre dans un projet qui demande une conception plus poussée et une gouvernance renforcée.
Ces critères ne sont pas exhaustifs. Leur rôle est de cadrer les attentes et d’éviter que les métiers se lancent seuls dans des projets qui dépassent le périmètre du citizen dev.
Licences et coûts : un point de vigilance majeur
Le citizen dev ne doit pas être vu comme un contournement de la DSI, mais comme une démarche commune.
• Les métiers : ils connaissent leurs irritants et leurs processus. Ils sont les mieux placés pour imaginer des solutions rapides.
• La DSI : elle garantit la sécurité, la cohérence technique, l’alignement avec le SI et le respect des contraintes budgétaires.
La réussite passe par une alliance : donner de l’autonomie aux métiers, tout en permettant à la DSI de jouer son rôle de garant.
1. Former les équipes
Une gouvernance commence par la montée en compétences. Former les futurs citizen developers à Power Apps, Power Automate et Power BI est essentiel. Mais il ne s’agit pas seulement de tutoriels techniques :
• Sensibiliser aux bonnes pratiques de design (expérience utilisateur, performance, compatibilité mobile).
• Expliquer les limites de la plateforme pour éviter les projets irréalistes.
• Donner les bases de la sécurité et de la gestion des données (qui peut accéder à quoi, comment sécuriser une API, etc.).
2. Nommer des référents métiers
Plutôt que de laisser chaque collaborateur expérimenter isolément, il est préférable de désigner des référents citizen dev dans chaque service.
• Ces “super users” accompagnent leurs collègues dans la conception des applications.
• Ils jouent un rôle de filtre et évitent la multiplication d’initiatives non coordonnées.
• Ils sont aussi un point de contact privilégié pour la DSI, qui peut concentrer son accompagnement sur quelques interlocuteurs formés et sensibilisés.
3. Avoir un relais identifié côté DSI
Le modèle idéal n’est pas de transférer tout le contrôle à la DSI, ni de la contourner. L’équilibre passe par un interlocuteur identifié côté DSI, chargé de :
• Valider les connecteurs utilisés et la compatibilité avec les SI existants.
• Vérifier la conformité aux règles de sécurité et de gouvernance des données.
• Tenir une cartographie des applications développées pour éviter doublons et incohérences.
Ce rôle de coordination peut être tenu par une **digital factory**, entité souvent présente.
4. Mettre en place un Starter Kit
La mise à disposition d’un kit de démarrage est un levier puissant pour canaliser les initiatives sans les brider.
• Gabarits d’applications prêtes à l’emploi.
• Modèles de documentation standardisés.
• Règles de nommage communes.
• Checklists de validation avant mise en production.
Microsoft propose déjà un “Center of Excellence Starter Kit” qu’il faut souvent adapter aux besoins et à la culture de l’entreprise. Cela réduit la courbe d’apprentissage et garantit une certaine homogénéité dans les livrables.
5. Contrôle qualité avant mise en production
C’est l’étape souvent négligée, mais la plus importante pour éviter des catastrophes. Une application peut très bien fonctionner en test interne, mais devenir inutilisable dès qu’elle est déployée à 500 utilisateurs.
Nous recommandons un audit qualité systématique avant la mise en production. Chez ezacae, nous avons développé Kali, un outil d’audit qualité des applications développées en low code, qui permet de garantir que chaque application mise en production respecte un standard minimum et pourra être maintenue dans la durée.
La Power Platform est une évidence pour les organisations déjà dans l’écosystème Microsoft. Mais elle n’est pas l’unique option.
• Pour des cas orientés data, des outils comme Airtable ou Timetonic sont puissants et offrent une grande souplesse.
• Pour des applications centrées sur la gestion de workflows et de tâches, des solutions comme Monday.com, Notion ou Coda permettent de déployer rapidement des outils légers.
Ces alternatives montrent que le citizen development est une tendance de fond, bien au-delà de Microsoft.
Le citizen dev n’est pas nouveau : hier Access, puis Excel, aujourd’hui Power Platform. La différence, c’est la maturité des outils et leur capacité à transformer des solutions locales en véritables applications d’entreprise. Mais une règle reste immuable : sans gouvernance, on recrée les mêmes problèmes qu’avant.
Définir des critères clairs, mettre en place une démarche commune métiers/DSI et instaurer des standards de qualité, c’est ce qui permet de faire du citizen development un levier durable d’innovation et d’efficacité.
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